Dorothée & Justine
017 05/05/2023
(Musique de fond)
Hermine : Bienvenue dans « H comme handicapé.es », le podcast qui donne la parole aux personnes handicapées parce qu'on ne les entend pas assez. Aujourd'hui je suis avec Dorothée et Justine qui sont…, deux anciennes invitées et qui sont là aujourd'hui pour nous donner des nouvelles, et…, nous dire un peu les souvenirs qu'elles ont des enregistrements qu'on a faits ensemble. Bonjour à toutes les deux, merci de revenir encore une fois.
Du coup, Dorothée est-ce que tu peux te présenter un petit peu ?
(Fin de la musique de fond)
Dorothée : Alors oui, donc Dorothée, j'ai trois enfants de 18,16 et, 7 ans et j'ai une maladie invalidante, donc qui provoque…, quelques difficultés…, au quotidien. Euh, je travaille à 100% malgré tout, voilà.
Hermine : Et Justine du coup ?
Justine : Bah, bonjour moi c'est Justine donc…, j'avais fait un des…, premiers numéros du podcast sur le tatouage. Donc, moi j'ai 37 ans, je suis belge, j'ai une myopathie donc une maladie qui touche les muscles et voilà, c'est ça je travaille à temps plein et puis je, je milite aussi, dans le…, milieu de l'antivalidisme.
Hermine : Du coup, Dorothée est-ce que tu peux nous dire un peu quels souvenirs tu gardes de l'enregistrement du podcast…?
Dorothée : Alors… J'ai beaucoup aimé faire le poscast, le podcast pardon, parce que ça m'a fait réfléchir à certaines choses… J'ai beaucoup aimé échanger avec toi et avec Thérèse aussi. C'était vraiment sympa ! Après…, dans un second temps, je me suis dit : « Mince ! On a, évoqué que le positif !». On a évoqué que, ce qui se passait super bien et j'ai eu un peu honte parce que je me suis dit : « Mais je veux pas qu'on croie que c'est quand même super facile ». Notamment, moi j'ai la particularité d'avoir, bah sur mes trois enfants, la maladie ça…, a continué à se dégrader en fait. Chaque accouchement a provoqué, et puis voilà la jeune enfance c’est très fatiguant, donc ça a accentué en fait les poussées et caetera. J'ai vraiment vu mon état…, mon état de, se dégrader et j'ai beaucoup de respect en fait, pour les, les mamans qui galèrent avec des pathologies plus compliquées ou avec des, une invalidité plus prononcée et… Voilà, malgré tout ça reste quand même… : super difficile. Voilà, c'était juste le, voilà je voulais modérer l'enthousiasme que Thérèse et moi avions, parce que c'est vrai que…, voilà. Oui, ça se fait hein, être handicapé.e et parentalité, mais…, y'a quand même…, y'a quand même pas mal d'obstacles. Et, ouais, fallait, faut le dire quand même.
Hermine : J'ai eu un peu le même ressenti après c'est que c'était quand même très positif et du coup pas très représentatif. Mais je me rappelle qu'à la fin de l'épisode, on avait essayé de nuancer un petit peu, mais c'était pas…, trop ça quand même. Et en fait, c'est vrai que avec Thérèse, vous aviez un peu les mêmes, fin des parcours assez similaires et du coup…, c'était moins intéressant que si y'avait eu deux invité.es…, assez différents quoi…
Dorothée : Oui, pis… Le gros biais c'était qu'on était toutes les deux, fin on est toujours, fin en tout cas pour ma part, en couple, et je pense que ça fait une grosse différence parce que : y'a aussi des femmes, fin femmes…, des personnes qui se font quitter à cause du handicap, qui élèvent seu, seules leurs enfants. Des femmes et des hommes, et ça, ça, bah je pense que ça change tout ! Quand, on est handi.e et qu'on élève seul, seul.e son enfant, ça, tout devient beaucoup plus compliqué et, donc voilà, effectivement y'avait un biais. Après, je pense que nos témoignages, ils étaient à prendre…, voilà comme ça, comme des témoignages… Mais, puis voilà, je crois que t'as modéré après…, après diffusion par des témoignages écrits…, bah cette grande positivité, donc : voilà t'as apporté d'autres témoignages qui l'ont un peu modéré donc ça va.
Hermine : Ouais. Non c'est sûr. Mais, oui oui, ça m'avait fait pas mal réfléchir sur ça du coup, sur…, éviter d'avoir des profils qui se ressemblent trop quoi, pour que ça soit plus : pertinent. Et d'ailleurs…, j'ai recherché sur Instagram les personnes qui m'avaient contacté.e, justement pour faire des témoignages écrits. Et j'en avais eu du coup que…, fin à la base j'en avais quatre personnes qui m'avaient dit qu'elles étaient intéressées, et au final j'en ai eu que deux et une des deux qui a pas témoigné parce que elle avait pas l'énergie ou pas le temps et caetera… C'était pour parler justement de la peur que on lui enlève son enfant, que on lui retire son enfant et qui soit placé parce que elle est handicapée et que en plus son enfant est handicapé et fin, voilà. Et… Elle voulait parler vraiment de cette peur-là, avec laquelle elle vit au quotidien mais…, elle avait vraiment pas l'énergie et le temps, parce que encore une fois, ça devait être une maman…, célibataire et que, voilà quoi, les priorités. Mais : je relance un appel comme ça si y'a des personnes qui nous écoute, ça pourrait être le sujet d'un prochain épisode du podcast, euh, je parlerai du nouveau format un peu plus tard dans l'épisode, mais, mais voilà, si y'a des personnes qui é, qui sont concernées et qui veulent témoigner sur ces sujets là, mes mails et mes DM sont toujours ouverts, voilà. Bah du coup Justine…, même question : quels souvenirs tu gardes de l'enregistrement du podcast ?
Justine : Euh, moi je garde un bon souvenir… Si je me souviens bien c'était avec Léa. C'étaient… des, des expériences qui pouvaient être similaires mais, quand même complémentaires par rapport à notre approche…, de la démarche de se faire tatouer, c'est pas juste quelque chose d'esthétique je me souviens… Si je me souviens bien aussi bien pour elle que pour moi. Et même, l'expérience avec toi puisque…, sans, sans rien spoiler tu, tu es aussi tatoué.e. Donc...voilà. Je pense que c'était une chouette, une chouette rencontre, une chouette discussion. C'était pas de la redite, trois personnes qui avaient vécu la même chose et qui avaient vécu les mêmes expériences, donc… Non, c'était, c'était assez sympa !
Hermine : Ouais et pour le coup, ouais, à l'inverse de Thérèse et Dorothée, c'est vrai qu'on avait pour le coup trois profils assez différents…, trois handicaps assez différents et en même temps, on se rejoignait sur le tatouage et le rapport au tatouage et caetera. Et… Clairement c'est un épisode qui donne envie de se faire tatouer. Fin, si vous l'avez pas écouté et vous…, savez pas trop si vous voulez vous faire tatouer ou pas, allez l'écouter (rire), ça vous donnera envie. Moi aussi j'en ai un bon souvenir parce que…. Et ben, c'était le prem, la première fois que j'enregistrais avec deux personnes et c'était mon…, troisième, seulement mon troisième enregistrement quoi, et du coup j'étais un petit peu stressé.e et tout. Et au final, ça s'est trop bien passé avec Léa et c'était vraiment chouette quoi ! Du coup, Dorothée est-ce que tu…, veux parler du coup de maintenant et de…, qu'est-ce qui s'est passé avec ta fille et tout ça ?
Dorothée : Oui. Alors… Depuis que…, j'ai enregistré, alors j'étais voilà très positive parce que je trouvais que ça se passait bien… En fait, entre mes deux grands et ma petite, je disais, bah y'a eu le fauteuil et voilà. Et là, récemment, j'ai vécu trois mois en situation de célibat géographique. Mon mari travaillait à 500 kilomètres, j'étais toute seule avec ma puce de 7 ans et…, une semaine sur deux j'avais mon grand qui était là, de 16 ans et qui était plutôt aidant, plutôt que… Bon, faut juste lui faire beaucoup à manger,voilà c'est juste le, mais par contre voilà c'est quand même beaucoup de boulot de lui faire beaucoup à manger. Et voilà, je me suis retrouvée, vraiment…, bête en fait. Parce que je me suis rendu compte déjà de la, de l'impact de la maladie au quotidien. A savoir que, au quotidien avec mon mari on se répartit vachement bien les tâches, donc y'a plein de choses que je fais pas et que lui fait…, fin je le fais pas parce que j'y arrive pas, parce qu'avec mes mains c'est trop douloureux, c'est trop difficile… Notamment sur tout ce qui est, bah, préparation des repas en fait… Et puis tout ce qui est gestion du fauteuil, c'est lui qui gère au quotidien parce que c'est un peu lourd parfois et tout donc…, il s'en occupe. Et, là d'avoir à faire tout ça…, bah ça été compliqué. Mes mains, alors étaient en poussée alors c'était très compliqué à gérer. Et puis, y'a eu aussi, l'impact, des, des choses qui ne sont pas accessibles au quotidien, bah c'était pas grave parce que c'était lui qui gérait. Et là, je me suis retrouvée, dans des galères pas possibles, parce que, la garderie de l'école n'était pas…, réglementaire. Donc même si ça faisait six mois qu'on disait : « Attention, attention ! Je vais être en difficulté. ». Et puis portée par plusieurs personnes hein, le périscolaire, par la direction de l'école et caetera, c'était c'était pas fait. Donc, j'ai été vraiment très, très, très pénalisée et là pour le coup, je me suis dit que si j'étais vraiment célibataire, je pourrais pas bosser en fait. Bosser…, élever mes enfants fin c'..., c'..., ingérable vraiment, avec trop de, comment dire ? Trop de freins tout le temps, en fait ! Parce que, si elle est malade, fallait que je rentre, si y'avait grève fallait que je rentre, si y'avait n'importe quoi en fait. Et puis, j'ai des réunions à l'extérieur donc fin, tout le quotidien devenait extrêmement compliqué… Et là je me suis dit : « Bah en fait toute seule, ça serait, ça serait chaud !». Fin ça, je dis pas du tout que c'est impossible, bien sûr que c'est possible, mais pas en bossant 100%, pas… Surtout que moi j'ai quand même pu compter sur des ami.es, sur…, sur : mon fils de 16 ans qui m'a filé quand même pas mal de coup de main, au niveau gestion du quotidien, pis des fois aussi quand j'étais en…, voilà, en trop grande difficulté, il allait chercher la petite…, à l'école. Lors de le premier enregistrement j'avais trouvé que c'était très positif, pis là je me suis rendu compte que, bah on a peut-être été hors sol en fait, parce que, en fait, ce qui me, ce qui me fait un peu de peine c'est que j'espère qu'on a juste vexé personne et heurté personne en étant trop positives. Parce que là je me rends compte à quel point on se sent, mais, isolée, on peut être super mal. Et cette peur qu'on me retire mon enfant, bah moi je l'ai vécue. Hum, je me suis dit : « j'espère que y'a personne qui dira que je suis une mauvaise mère ». Parce que c'est vrai que y'avait des soirs… Après, j'étais dans une mairie, fin, dans la ville où j'étais en fait, la mairie était compliquée, en fait. Il fallait toujours prévenir super longtemps à l'avance et dès que tu faisais un changement de plan, tu te tapais un petit mail moralisateur et… Et ça, je l'ai pas bien vécu, parce qu'en fait je faisais vraiment comme je pouvais. Et là pour le coup je dirais, ça concerne, les personnes en situation de handicap mais aussi les autres, voilà les autres mères célibataires bah elles galèrent tout autant je pense, dès lors que, que tu dois tout gérer, je pense que t'es vraiment en difficulté. Et… Et ouais, je l'ai pas bien vécu. Après, voilà, j'étais très soutenue hein ! Et, mais je me suis rendu compte que, par cette expérience de trois mois, que j'étais hyper, hyper privilégiée : d'être en couple, d'avoir un mari aidant, d'avoir, des collègues et des ami.es hyper présents aussi, fin voilà de, que j'étais vraiment dans un, voilà j'étais chanceuse quoi. Mais que c'est pas le cas forcément, et que dans ce cas-là effectivement, la parentalité en étant handi.es est super compliquée. Donc, voilà, c'était le petit frein (petit rire), que je voulais…, émettre. Mais bon, après voilà, là on habite tous au même endroit maintenant, dans une région magnifique, qu'on adore donc on est ravis et c'est un sacrifice de trois mois qui valait le coup d'être fait. Pis, voilà, je pense que moi ça m'a fait ouvrir les yeux sur pas mal de choses…, sur parentalité et handicap et aussi je, aussi sur le handicap, voilà, je pense que là… Il s'est quand même bien, voilà, aggravé et que, voilà faut que j'en tienne compte quoi. Faut que je prenne ça en compte. Voilà. Donc je vais laisser la main à Justine maintenant pour avoir un témoignage un peu plus positif.
Hermine : Nan, mais oui, justement, je trouve que c'est bien, du coup ça contrebalance ton premier té, témoignage que tu reviennes et tout… pour parler de ça, c'est vraiment chouette…
Dorothée : C'est marrant parce que quand tu m'as envoyé le MP, je me suis dit : « Mais oui, j'ai plein de choses à dire ! » Parce qu'au f…,je viens de vivre ça et je veux le dire parce que ça me mettait mal à l'aise d'être aussi positive parce que je me disais :« bah, quand même ! Voilà, on pourrait croire que c'est une balade dans, dans le parc, alors que pas du tout !». Et l'autre truc, qui m'a un peu fait mal aussi, pendant ces trois mois, c'est que je me suis rendu compte, alors que mon fils de 16 ans compense un peu, ça m'a pas outre mesure dérangée, parce que voilà, il est grand et tout. Mais ma fille a commencé à compenser aussi. A me dire : « Non fais pas ça maman pour tes mains, va pas t'abimer plus les mains qu'elles le sont déjà. ». Ça, cette phrase-là elle a été dure. Voilà, à ma tenir les portes de tout son poids pour que je galère pas à tirer ces, ces foutues portes qui pèsent trois tonnes et, je pense que tout le monde voit ce que je veux dire hein (rire dépité dans la voix), avec les, voilà… En fauteuil, fin c'est un cauchemar ces portes. Alors, le pire c'est que des fois, elle avait tout son poids dessus pour m'ouvrir une porte, donc elle attend un peu pour que je passe et pour pas se mettre au milieu, et y'a quelqu'un de valide, qui, qui passe et qui en profite pour passer, et à chaque fois ça me fait halluciner, je me dis : « nan, mes les gens franchement !». J'adore quand je vois ça, je me dis : « Nan, mais ils se rendent pas compte…, mais voilà ». Et ça, c'était pas facile parce que, avec mes grands ce que j'avais connu de leur part, c'était la peur que je meure. J'étais très, très malade, hospitalisée…, avec beaucoup de morphine et tout. Et de la petite là, j'ai, j'ai, voilà, je vois le fait qu'elle puisse compenser et, et voilà. Donc, ça a duré pas longtemps mais je, je connaissais la thématique des, des enfants qui codent pour leur parents avec des parents sourds, malentendants, et maintenant là j'ai, j'ai vu ce que ça pouvait faire en tant que parents et, et je vois toute la problématique de, bah de laisser à l', aux enfants leur place d'enfant, en fait. C'est pas à eux de s'inquiéter pour les parents, c'est pas à eux de, malgré tout ils le font hein, malgré tout ils le font, mais… Je pense que si cette situation-lá avait perduré, il aurait fallu qu'on se positionne vraiment autrement, et puis qu'elle ait un suivi aussi, parce que, voilà, pour pas que, que ça l'affecte trop quoi.
Hermine : Ouais, c'est clair, mais…, ça montre à quel point en fait, le validisme institutionnel ça impacte tout…, l'entourage en fait.
Dorothée : Tout le monde ! Ah oui oui ! Ah nan mais c'est sûr !
Hermine : Oui, pas, pas très joyeux ! (Sourire dans la voix)
Dorothée : Naaan, c'est ça ! Mais, mais après le tout c'est d'en être conscients et…, fin moi je dirais : l'essentiel c'est fin, on peut pas être un parent parfait, alors quand on est valide… Je sais pas si les gens s'en rendent compte quand y sont valides, mais je pense que justement quand on est en situation de handicap on le sait, ça, qu'on peut pas être le parent… Et moi des fois ma fille elle me le dit : « Oh j'aimerais bien que tu remarches comme avant ! ». Je dis : « Baaah c'est compliqué hein, c'est…». Mais… Je lui dis : « Mais regarde ! On fait ça, on fait ça, on fait pleeeiiin de choses ensemble ! ». Et je dis : « Voilà, y'a des parents…, qui même, tu sais même pas handicapés et bah y font pas tout ça, ça ça, ça ça ! ». Elle m'dit : « Ah bah oui c'est vrai.». Et, voilà, je pense qu'on est parent autrement, voilà. On a une autre parentalité, qui est pas moins bien, qui est pas moins riche et caetera. T'façon dans nos vies, fin je veux dire, y faut, faut voir tout ce qu'on a, et plutôt que tout ce qu'on a pas et plutôt que tout ce qu'on a perdu. Fin faut vraiment regarder de l'avant ! Et dans la parentalité aussi. Donc, au contraire, moi je trouve que, alors voilà, je vais vraiment fi, finir par une note vraiment positive cette fois. Et je vois mes deux grands qui ont 18 et 16 ans, ils ont des rêves : ils se donnent vraiment les moyens de leurs rêves, hum, je veux pas trop t'en parler parce que c'est leur vie à eux, j'ai paaas forcément envie de parler à leur place, mais voilà, y, y sont travailleurs, y sont, voilà, ils vont vers leurs objectifs… Alors, quand je dis travailleurs, c'est pas que dans le scolaire et tout, c'est vraiment : y vont v…, voilà, vers ce qui leur plaît et y se donnent les moyens d'arriver à leurs fins. Et je me dis, bah peut-être que le fait d'avoir une maman…, qu'en a toujours bavé avec sa santé et bah ça, voilà ça leur a donné…, fin ils réalisent ça, que si on fait pas les choses et bah ça viendra pas tout seul et… Voilà ils savent que la vie est courte aussi, qu'on sait pas dans quel état on finira demain, et du coup ils profitent de ce qui ont.. Voilà… Les deux veulent voyager, je leur ai dit : « bah, allez-y ! ». Fin, voilà, si vous-même voulez partir bah partez loin, profitez eeeeet, et voilà je pense qu'on a plein d'autres choses à apporter, donc… Go (rires), go pour… faire des bébés même si…, ça peut être compliqué, ça sera toujours une belle chose…, mais ceux qui en, qui veulent pas d'enfants c'est ok aussi ! Y'a pas du tout de, d'injonction à étre parents, au contraire. Nan, c'est ceux qui veulent.
Hermine : C'est clair, c'est clair ! Mais d'ailleurs…, ces derniers mois là, y'a plusieurs personnes handicapées que je suis sur les réseaux qui sont devenus mamans, eeeeet, c'est trop bien en fait d'avoir cette représentation-là… Même moi qui veux pas d'enfants, juste de voir qu, quelqu'un avec un bébé qui est en fauteuil et tout, fin c'est, je trouve ça génial… Du coup… Ouais, n'écoutez pas les valides si vous avez envie de faire des bébés, faîtes des bébés (rires) !
Dorothée : Ouais, c'est ça ! Et puis… Faut pas se laisser freiner, fin, je pense que y'a que nous vraiment qui pouvons connaître nos possibilités, hum, si on dit qu'on peut faire un truc on peut le faire, si on peut pas… Et puis, en même temps, un bébé personne se rend compte de ce que c'est, vraiment. Fin, les premières années c'est super compliqué ou pas, ça peut être aussi vachement simple hein ! Ça dep…, en fait ça va dép, ça dépend vraiment du bébé, mais ça, c'est vraiment à la personne de le sentir elle-même et de, si une personne en situation de handicap dit : « Je veux un enfant et j'en suis capable et…». Bah qu'elle y aille quoi parce que y'a tou, y aura des situations, fin des, des moyens de compenser et d'aider et caetera. Après, c'est vrai que c'est difficile à trouver mais, mais ça se fera, c'est… Voilà.
Hermine : Merci pour cette note, note positive quand même. Comme ça, ça fait positif, négatif, positif, genre j'aime bien.
Dorothée : Ouais c'est ça ! Non bah il vaut mieux c'est ça ! C'était…, une thèse en, en trois parties.
Justine : Ouais, pis en même temps c'est une, fin c'est des moments, tu sais. J''entendais Dorothée qui parlait, peut-être que le premier il était trop positif de podcast, c'était peut-être juste l'image du moment en fait et que, bah finalement, la vie…, elle est un peu comme ça, à faire des hauts et des bas et… Et ça dépend de la personne, de son cadre de vie, de l'entourage et… Je pense qu'en effet, comparer les gens c'est, ou comparer les situations c'est impossible, mais que ce soit entre deux paires de parents valides ou pas, ou, ou quoi que ce soit, je pense que… C'est vraiment un truc qu'on a dans notre société de, et en plus avec les réseaux sociaux, de souvent comparer et, et regarder et, moi j'ai des ami.es qui disent : « Ah bah tiens… A, à cet âge là, il faudrait savoir faire ceci, savoir faire cela». Et… Fin voilà, chacun, chaque jour après l'autre et selon chacune de nos situations quoi.
Hermine : Complètement, complément. Mais en, en même temps fin, je sais que cet épisode sur l'handiparentalité, il a quand même eu des très bons retours. Fin, je sais que y'a beaucoup de personnes qui l'ont écouté même des personnes pas concernées et tout, et…, et à chaque fois j'ai eu des bons retours dessus. Et à chaque fois je disais : « Ouais mais je suis pas très satisfaite parce que c'était trop positif et tout ». Et les ils me disaient : « Nan, mais quand même c'était très intéressant ! » et tout, j'étais là : bon d'accord (rires). Mais…, mais voilà, ça, ça mérite à été un peu plus approfondi si y'a d'autres personnes encore une fois qui sont concernées et qui veulent témoigner… Vous pouvez me contacter. Mais ça, j'en parlerai un petit peu plus tard. Et du coup Justine, où tu en es aujourd'hui, niveau tatouages ?
Justine : Alors, aujourd'hui…, depuis le dernier pi, dernier épisode pardon, j'ai un petit nouveau qui date d'y a genre un mois, à peine. Voilà je, après le, le dernier que j'avais fait je pense en 2019, c'était plus trop l'objectif parce que y'avait beaucoup d'autres choses dans notre vie…, qui font que bah voilà, les finances n'étaient pas forcément…, là et dirigées sur le tatouage… Puisque j'ai quand même une famille de trois personnes…, à faire vivre, quasi sur mon seul salaire, donc c'est pas toujours, toujours simple et donc faut savoir mettre les priorités. Et pis là, y'a…, y'a quelques mois de ça je vais dire, c'est une tatoueuse que je suis depuis un long moment parce que j'adore son style, qui s'appelle… : Lia November, sur notamment Instagram. Et elle avait sorti une planche de, de flashs en collaboration avec un tatoueur qui s'appelle Monsieur Charles…, il tatoue tous les deux à Bruxelles…., à la folie douce atelier je pense, si je me trompe pas. Et c'était toute une déclinaison autour de la phrase : Après la pluie…, avec, bah soit un petit arc-en-ciel coloré, soit des petits nuages, des petits cœurs, des petites gouttes de pluie et caetera. Chaque fois, la phrase était en noir et puis tout ce qui avait autour était en couleur. Et, j'ai vraiment eu un coup de cœur pour…, pour cette déclinaison, et donc voilà, j'ai montré la, la, la planche à mon épouse en lui disant : « bah tiens, j'aime vraiment bien, est-ce que y'en a un qui te parle plus que les autres ? ». Elle en a choisi un et, et on est parties pour celui-là. J'ai tout de suite envoyé un mail à la, à la tatoueuse, il était toujours dispo, c'est moi qui était là première à, à, à être intéressée donc on est parties sur celui-là. Et qui depuis a une résonance encore plus particulière, puisqu'en fait je me suis fait tatouer juste le jours avant…, qu'on enterre ma grand-mère qui était partie…, une semaine plus tôt. Et donc, c'est vrai que cette « pluie après la pluie », généralement on sait que la fin de la phrase c'est : « Après la pluie vient le beau temps ». Et donc, dans mon expérience de vie, que ce soit avec le handicap, avec pas de choses…, d'expériences de vie que j'ai eues, ce côté le positif qui vient après le négatif a beaucoup d'impact et beaucoup d'histoires, mais c'est vrai que là en plus, me faire tatouer…, voilà juste dans cette période particulière de perdre un proche, ça, ça donnait encore une signification…, toute particulière au tatouage. Et… c'qui était marrant, c'est que je me souvenais plus du tout de la sensation que ça faisait de se faire tatouer, donc je n'avais plus aucune idée de si j'avais eu mal les fois précédentes et caetera. Vraiment…, c'est cet oubli qu'on peut avoir. Et du coup, je me faisais tatouer sur le ventre et je, donc c'était super mon bras gauche, il est sur mon, l'arrière de mon bras gauche au-dessus, juste au-dessus du coude, et donc j'avais glissé ma main droite dans ma poche et je, j'avais attrapé l'intérieur de ma poche comme ça en serrant en me disant : « Si jamais en fait ça fait mal et que je m'en souviens pas, au lieu de sursauter sous l'aiguille, je, je serrerai un peu plus dans ma poche». Et finalement nan, bon ça s'est très bien passé. Mais c'est assez drôle parce que, j'ai quasi maintenant, l'entièreté des deux bras tatouer avec des très, très grandes pièces qui ont duré…, des heures et j'en arrive toujours à oublier ce que ça fait, complètement. C'est, c'est, c'est assez drôle. Mais…, mais voilà. Du coup…, il reste une place sur mon bras, qui est l'avant de mon bras gauche en haut. Hum, moi j'ai envie de voir mes tatouages donc je me suis toujours dit que je m'arrêterai à mes bras. Je sais qu'une fois qu'on commence c'est très dur de s'arrêter, mais j'aimerais bien m'arrêter à mes bras. Donc voilà, il me reste on va dire une ou deux places, je crois que un ou deux projets et puis après peut-être vraiment des petits trucs qui permettent de fignoler les, les blancs qui restent sur mon bras on va dire. Mais…, ça c'est le petit dernier en date. Et donc du coup, moi j'l'ai, j'l'ai, j'l'ai choisi avec : un petit nuage et des…, une pluie de petits cœurs multicolores au-dessus du, au-dessus du nuage.
Hermine : Et c'est marrant quand tu parles de…, sursauter pendant les tatouages ou quoi, moi ça m'a fait penser à…, parce que du coup, moi, quand on a enregistré l'épisode j'en avais trois, et là j'en ai dix (rires). Donc j'ai un petit peu augmenté depuis la dernière fois, et du coup y'a eu pas mal d'évolution notamment sur ma gestion de la douleur du tatouage, aussi parce que : le premier que j'ai fait c'était sur les cuisses et, ça m'avait fait hyper mal (rires)! Vraiment au niveau douleur c'était un des pires. Et du coup après quand j'ai fait les bras c'était…, beaucoup plus tranquille. Et, c'est rigolo parce que je suis retourné.e… Je viens de me souvenir là que dans l'épisode sur le tatouage, le premier, je parlais de l'androgynette, et… En fait, récemment là, en décembre dernier, je suis retourné.e voir l'androgynette, parce que maintenant j'habite à Rennes, et l'androgynette elle est à Nantes, du coup je peux faire Rennes-Nantes hyper facilement. C'était…, du coup l'occasion de retourner la voir quoi. Et (rire dans la voix), c'était rigolo parce que du coup, quand elle avait fait le premier sur mes cuisses, bah, j'avais des spasmes…, incroyables parce que ça me faisait hyper mal et que j'étais stressé.e et tout. Et là…, ben le, le nouveau qu'on a fait c'était sur mes biceps et…, j'étais allongé.e et j'étais tranquille, détendu.e et tout. Et, un des premiers trucs qu'elle m'a dit c'est : « Mais t'as pas de spasmes ! (Rires)» Genre, elle était vraiment étonnée que j'aie zéro spasmes. J'lui ai dit : « Bah ouais bah c'est un peu mon huitième mais, fin, je commence à être un peu rôdé.e quoi… Du coup je commence à avoir l'habitude et tout. ».
Justine : Ben c’est vrai que moi j’ai une maladie où j’ai des douleurs constantes. Donc j’ai mal vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans l’ensemble du corps, et donc toute chose qui peut amener une douleur supplémentaire c’est presque une angoisse mais d’office, genre je dois aller chez le dentiste, j’angoisse, je dois aller faire une prise de sang, j’angoisse. Rien que l’idée de se dire « j’ai déjà mal tout le temps mais en plus je vais devoir faire un acte qui va être douloureux et c’est pas moi qui l’ai choisi ». Tandis que là, le tatouage, je me dis ben là, c’est… c’est moi un peu qui reprends le contrôle sur la douleur. Et finalement c’est peut-être ça qui joue, j’ai tellement mal en permanence que la douleur du… la douleur du tatouage, s’il y en a une n’est pas… suffisante pour contrer la douleur que j’ai au quotidien… je sais pas comment l’expliquer. Mais c’est vrai que, il en a juste un, j’ai eu un peu mal, parce que vraiment, sous les bras, le côté un peu plus sensible. Mais c’est vrai qu’aussi, voilà, on m’a dit « oui mais c’est les bras, les bras ça fait moins mal »… Donc, voilà il y avait pleins de choses qui doivent jouer, mais c’est vrai que… c’est, c’est différent quoi.
Dorothée : Si je peux me permettre, Justine, moi c’est exactement pareil. Donc j’ai mal tout le temps, et tu vois, les piqûres, je veux plus me les faire parce que… parce que c’est trop dur en fait donc c’est l’infirmière qui vient me faire mes piqûres, voilà, tout, toutes blessures… le dentiste c’est pareil, c’est l’enfer, et, bon. T’apprends à faire avec, mais le tatouage t’as pas la même appréhension. Alors après je dis ça mais pour les bras, parce que le dos, le dos j’en ai vraiment bavé. C’est… c’était vraiment dur et pourtant j’avais augmenté les doses de morphine, pour le dos. Mais c’est fait pas grand-chose, sur tout ce qui est dermato la morphine. Donc, nan nan, c’était… c’était chaud, mais, mais je trouve ça intéressant comme les douleurs choisies… mais je crois que c’est assez recherché, c’est assez étudié, d’ailleurs sur le fait que les, les malades chroniques de douleur se font tatouer, justement pour avoir notamment cette action positive sur leurs corps, enfin en tout cas qu’ils ont choisi. Et puis… ben ce contrôle sur la douleur.
Justine : Et moi, par exemple, un… un truc tout con c’est que je… j’étais en carence continue de B12, donc on avait essayé des cachets, des machins, et puis l’étape d’après c’est des injections dans la fesse mais ça fait… ça fait super mal en fait ! Enfin moi ça me faisait super mal cette injection et c’était une fois par mois et j’avais dit à ma neurologue « si ça marche je m’en fous mais j’arrête je préfère être en carence que… » alors qu’elle me dit mais c… c’est, c’est une piqûre qui dure dix secondes une fois par mois. Et j’arrivais vraiment pas alors que le tatouage pendant des heures j’étais là « ouais ok c’est bon je gère », mais cette petite piqûre de… alors heureusement on a trouvé autre chose, un cachet qui fonctionnait mieux. Mais… C’était juste une piqûre mais impossible, quoi. Je bloquais complétement.
Dorothée : Ouais mais je pense que c’est l’état d’esprit aussi parce qu’en fait c’est… ça s’ajoute à tout le truc en plus, tu vois, t’es malade, tu souffres etc. et en plus on te fait mal… Et moi les… par exemple les, les piqûres j’en suis venue à faire des véritables angoisses où à l’hôpital ils m’ont dit « bon cherche pas plus, si ça vous met dans des états pareil on… c’est l’infirmière qui vient, elle le fait… » et puis… bon par contre moi j’ai… c’est vrai que moi j’ai un vrai bé… enfin, il y a un très gros bénéfice à ces piqûres-là hein. Voilà, je peux plus vivre sans, donc ça motive quand même mais par contre plus à la faire moi parce que c’est, ça me mettait dans des endroits vraiment pas chouettes quoi.
Justine : Mais moi c’est un stade où par exemple je vais regarder un film, je vais voir quelqu’un qui a une blessure ou qui a une cicatrice etc., je vais imaginer la blessure qu’il a dû avoir et la douleur qu’il a dû avoir, pour avoir ce truc et donc au début les premiers tatouages j’arrivais pas à regarder la personne qui me tatouait parce que je… je, j’avais l’impression que ça allait démultiplier la douleur dans ma tête, il m’a fallu le troisième ou le quatrième tatouage pour me dire « bon ça va je regarde tranquille, le sang ne me gêne plus, voir l’aiguille rentrer dans mon bras je ne… voilà, je n’extrapole plus la douleur etc. » Mais… ouais ça a quand même pris un ou deux tatouages quoi.
Dorothée: Du coup t’as bien fait d’en faire plusieurs, tu vois (rire).
Justine : Voilà c’est ça.(rire)
Dorothée : C’est pour ça qu’Hermine elle en fait dix, c’est pour amortir le truc (rire).
Hermine : (Rire), ben moi j’ai même pas fini encore, là j’ai encore tellement pleins de projets, genre dix c’est que le début là genre… En fait les gens qui demandent quand est-ce que tu vas t’arrêter pour les tatouages genre « t’en as pas marre, est-ce que tu veux pas te calmer cinq minutes ? », non en fait. Parce que moi j’ai, j’ai remarqué que en fait plus j’ai mal, plus mon corps perd des forces etc. et plus j’ai mal, plus j’ai envie d’en faire (rire bref). Parce que j’ai envie d’avoir justement ce contrôle, vraiment je l’ai senti ces… ces derniers mois parce que… c’est un peu cliché ce que je veux dire mais c’est vrai, j’ai eu trente ans l’année dernière et le cap des trente ans physiquement je l’ai senti passé quoi. J’ai plus de mal à faire des choses, j’ai plus de douleurs qu’avant etc. Moi j’ai pas mal tout le temps mais j’ai des douleurs chroniques clairement que j’avais pas avant. Et du coup maintenant ouais je ressens le tatouage comme ça, comme ce truc de contrôler… enfin d’avoir ce… un contrôle sur mon corps quoi. Alors que voilà j’ai… j’ai juste trente ans et il est déjà… j’ai l’impression d’en avoir quatre-vingts des fois… tellement, tellement je suis fatiguée et tout donc ouais, vraiment il y a ce contrôle-là... Et ce que vous disiez sur les aiguilles et tout ça me fait penser à… aux médecins et aux infirmières qui… qui disent, enfin moi quand je me suis fait vacciner ou quand j’ai, quand j’ai fait des prises de sang etc., les gens qui disent « oh mais ça va vous avez pleins de tatouages, vous allez pas avoir peur des prises de sang… »
Justine : On me la sort tout le temps aussi ! « C’est bon vous avez pleins de tatouages, c’est, c’est juste une petite aiguille du coup », mais ça n’a rien à voir !
Hermine : C’est pas du tout la même taille d’aiguille déjà, genre (rire). C’est absolument pas la même chose, enfin genre, ouais, la comparaison qui ne sert à rien, quoi, vraiment, arrêtez ça (rire). Du coup, merci pour cette petite conversation, on est parti·es assez loin de… c’est vrai que Dorothée, à la base t’étais pas là pour parler de tatouages mais… (rire)
Dorothée : Nan ! (Rire) ben non mais, mais je pense que c’est assez fréquent quand même.
Hermine : Des handicapé·es tatoué·es ? Oui je pense, oui (rire) ! Je pense.
Dorothée : Ouais, je pense que c’est très fréquent. Nan nan mais c’est… il y a vraiment une réappropriation du corps qui passe par le tatouage.
Hermine : Mais vraiment. Et oui d’ailleurs, je voulais dire, une dernière chose parce que je sais qu’il y avait pas mal de personnes quand on a fait l’épisode sur les tatouages qui m’ont dit que elles avaient peur de se faire tatouer et notamment les personnes qui ont une paralysie cérébrale comme moi, et qui ont beaucoup de spastici… spasticité dans les jambes etc. Et qui avaient peur de justement, d’avoir trop de spasmes et de trembler, machin. Et en fait, je suis là pour dire que ça se fait, c’est possible en fait. Il faut juste trouver un tatoueur ou une tatoueuse qui soit vraiment à l’écoute et… au pire je sais que j’ai déjà vu des… j’ai déjà lu des témoignages sur les réseaux sociaux de personnes qui disaient que carrément elles se… elles étaient scotchées à la table pour pas bouger. Donc dans les cas les plus extrêmes de spasticité ça peut en arriver là. Mais sinon vraiment ça… ça se fait quoi. Je me rappelle même une fois j’étais à une convention de tatouage en Angleterre et j’ai rencontré un mec qui avait une paralysie cérébrale aussi, et lui pour le coup son corps entier c’était un spasme. Il était vraiment hyper hyper spastique, et il était beaucoup tatoué, et du coup après l’avoir rencontré, après je me suis dit « ah nan mais si lui il est tatoué comme ça, moi ça va en fait, moi je… je peux gérer quoi. » Donc, vraiment, ouais. C’était aussi pour dire, ça se fait, et c’est vraiment beaucoup plus de positif que de négatif, même si c’est… pas toujours un bon moment à… à passer par rapport au spasmes et tout mais… et c’est aussi une question d’habitude, vraiment, parce que le stress et tout ça ça joue. Une fois qu’on a l’habitude c’est beaucoup plus tranquille, quoi. Voilà, je tenais à dire ça… entre personnes paralysées cérébrales, là je sais qu’on est beaucoup par ici donc, voilà, c’était important. Je pense que on peut passer à la question « recommandations culturelles » du coup. Justine il me semble que tu avais des livres à recommander, si je ne m’abuse.
Justine : Alors moi je me suis fait une liste de pas mal de livres écrit par des militantes, surtout dans le milieu anglophone. Donc j’ai comme ça une quinzaine, une vingtaine de livres et dés que je peux, dés que j’arrive à les trouver surtout parce que c’est pas toujours simple, mais là celui que je suis en train de lire c’est Crippled de Frances Ryan, qui est une journaliste britannique. Et donc qui fait un peu le point sur la situation… suite, ben aux jeux paralympiques à Londres, suite aux différents gouvernements qui se sont mis en place, il y a beaucoup de témoignages de personnes et de la situation qu’ils vivent dans son livre et ça donne juste envie de tout retourner et de tout cramer parce que… il y a des choses qui sont juste mais… inacceptables et c’est juste hallucinant de… de se dire qu’en 2023 les gouvernements laissent encore les gens dans des… de telles situations. Donc il est pas forcément facile, en plus il est que en anglais, comme beaucoup de livres ils sont… ils sont rarement traduits. Mais celui là il est, il est super intéressant, c’est celui que je suis en train de lire pour le moment, et un documentaire mais je pense qu’on est nombreux et nombreuses à souvent le conseiller c’est Crip camp qui est sur Netflix, je pense qu’il est sur YouTube aussi. Produit par les Obama vraiment sur… ben les premiers militants Américains, il y a aussi une histoire de convergence des luttes avec les Black panthers, la communauté queer etc. Il est vraiment vraiment très chouette. Donc, ça ouais ce serait mes deux recommandations actuelles.
Hermine : Il est dispo sur YouTube mais il est sous-titré que en Anglais et par contre sur Netflix il est sous-titré en Français, ouais.
Justine : En fait on n’a pas les mêmes catalogues en France qu’en Belgique, ce qui peut paraitre bizarre mais c’est le cas. Du coup parfois je cite des trucs mais je suis pas sûre qu’il est toujours là en France, qu’il soit déjà arrivé, ou parfois il y a des trucs qui arrivent en France et moi je suis là « il faut que je vienne à Paris pour mettre mon Net… mon Netflix en France », mais voilà, ouais nan mais je pense qu’il est sur les deux… sur les deux Netflix, là il faut pas passer à côté quoi.
Hermine : Il y est complétement parce qu’il a déjà été recommandé par Morgan·e dans l’épisode six et que je l’ai revu donc ça veut dire qu’il est encore là. Je l’ai revu récemment, après la mort de Judy Heumann, parce que Judy Heumann est très présente dans ce docu et que… pour les personnes qui ne savent pas qui est Judy Heumann, c’est du coup une activiste handicapée pour les droits des personnes handicapées aux États-Unis, qui a été une des premières personnes à… à vraiment lutter pour ça et qui est malheureusement décédée il y a quelques semaines, et du coup voilà j’ai un peu revu ça pour me donner de la force et vraiment je… je le conseille à tout le monde parce qu’il est génial, il est génial.
Justine : Et il avait été nommé aux Oscars et c’est bien que ça soit quelque chose… enfin, parce qu’il est bien, donc c’est bien qu’il soit nommé parce que parfois il y a des films ou quoi qui parlent de la thématique et on sait que voilà, c’est fait avec des acteurs valides, l’histoire est pas… et là franchement ce documentaire méritait cette nomination donc c’est vraiment cool.
Hermine : Complétement. Et d’ailleurs j’avais fait une petite boucle, je m’étais rendue compte quand je l’ai revu après le décès de Judy Heumann, en fait comme tu disais il a été produit par la boîte de prod du couple Obama. Et la boîte de prod s’appelle Higher Groud et c’est le titre d’une chanson de Stevie Wonder qui est un des artistes préférées du couple, et Stevie Wonder c’est, en plus d’être un des plus grands artistes de tous les temps c’est aussi un… une personne handicapée parce qu’il est aveugle de naissance. Donc voilà, petite boucle comme ça. Dorothée, est-ce que tu avais des recos ou pas ?
Dorothée : Euh nan, pas, pas qui ont pas déjà été faites avant.
Hermine : Ouais, ok. Moi j’avais deux autres qui sont d’ailleurs un peu en lien avec ce que tu viens de citer Justine parce que c’est un livre d’une militante anti-validiste française des années soixante, soixante-dix, qui du coup fait un peu écho à Crip Camp, parce que c’est du coup l’équivalent de tout ce qui s’est passé aux États-Unis, mais en France, et du coup c’est Élisabeth Auerbacher qui a écrit un livre qui s’appelle Babette, « handicapée méchante » et qui est un livre autobiographique où elle parle justement de tout ce mouvement-là, et de ce… sa vie et de son enfance dans les années cinquante, soixante en tant que personne handicapée. Et un peu comme toi en lisant le livre j’avais un peu envie de tout cramer parce que en fait on se rend compte qu’il y a pas grand-chose qui a évolué (rire bref), depuis les années soixante. C’est un petit peu rageant, enfin elle parle dans, dans le livre de… du fait qu’on est jamais assez handicapé pour avoir des aides, qu’il faut toujours justifier, et qu’il faut toujours aller pleurnicher devant, devant les assist… les assistantes sociales etc. Et j’étais bah… en fait, ouais, c’est toujours le cas en 2023, quoi. Du coup ça donne un peu envie de… de lâcher l’affaire, quoi, c’est un peu décourageant. Mais en même temps on sent sa colère, quoi. On sent qu’elle a jamais accepté le validisme, même dés son enfance et qu’elle a toujours essayé de combattre ça même si à l’époque il y avait pas… d’ailleurs c’est intéressant sur les termes qu’elle emploie. Parce que à l’époque du coup le terme « validisme » n’existait pas. Et du coup elle parle de, d’une forme de racisme, genre… elle, enfin elle dit que c’est du racisme pour elle alors que c’en n’est pas. Mais d’où l’importance des mots quoi mais enfin pour ça c’est intéressant du coup. On sent quand même sa colère du coup et c’est quand même assez contagieux si je peux dire ça comme ça, et ça… ça donne bien envie de, de tout casser, mais dans le bon sens du coup !
Justine : Ça me fait super rire cette anecdote sur le mot, tu vois, validisme qui existait pas. Parce que moi j’ai tenu un stand à un festival Belge, pour le collectif Les Devalideuses dont je fais partie. Et du coup on… je faisais un peu de pédagogie sur le validisme et il y a un couple de personnes âgées qui arrive et qui font « oh c’est quoi ça, le validisme ? ». Et donc je leur explique et ils font « ah ! Et maintenant on va utiliser des mots pour tout hein ! On va inventer des mots pour tout ! ». Et j’étais, j’étais là, mais vous pouvez passer votre chemin, il y a pas de soucis (rire). Donc ça me fait assez rire parce que ça me fait penser directement à ça… enfin inventer des mots pour tout ce qui existe, ben oui c’est bien, c’est intéressant et c’est important aussi de… de bien nommer les choses pour bien les, les, les cadrer et…
Hermine : C’est clair… ça me fait rire, mais ben oui, ben encore une fois que c’est pas la même génération quoi et que du coup… c’est, ouais, c’est ça, c’est rigolo. Donc ce livre, Babette, « handicapée méchante » il est pas dispo en physique mais il est dispo en PDF et en e-book sur internet pour genre cinq euros. Et vraiment je… ouais, je recommande parce que… rien que pour avoir un témoignage de l’époque et aussi pour comprendre pourquoi justement le mouvement handicapé méchant etc. n’a pas trop tenu et pourquoi c’est un peu tombé aux oubliettes et que du coup il y a pas eu vraiment les mêmes avancées que… que aux États-Unis ou en Angleterre etc. Vraiment c’est… c’est hyper intéressant. Et du coup le, la deuxième reco que j’avais est aussi en lien avec ça, et du coup se passe plutôt en Angleterre. C’est un film qui s’appelle Then Barbara met Alan mais en Français c’est, attendez, je sais plus…
Justine : Tout commence avec nous, nan ?
Hermine : Voilà, merci, c’est ça.
Justine : (rire) Je me demandais si… je me demandais si je te laissais chercher ou si (rire)…
Hermine : (Rire), nan si tu l’avais ouais ça m’arrangeais aussi (rire). Mais du coup ouais, Tout commence avec nous en français, et il est aussi dispo sur Netflix et du coup c’est un…j’ai envie de dire que c’est un docu-fiction parce que c’est inspiré de faits réels, et je crois qu’il y a des images… des images d’archives aussi dans le, dans le film. Et du coup ça parle du mouvement anti-validiste en Angleterre dans les années quatre-vingt-dix, et c’est vraiment un espèce de Crip camp mais version british, quoi, parce que… enfin moi c’est tout ce que j’aime. Ouais, j’avais l’impression qu’il y avait tout ce que je cherchais dans un film, c’était là quoi. Vraiment, depuis que je l’ai vu j’arrête pas d’en parler à tout le monde parce qu’il est incroyable. Et du coup ça parle de, de, de ce mouvement-là, de vraiment, de désobéissance civile de personnes qui se sont attachées, menottées à des bus pour réclamer l’accessibilité des, des transports etc. Et ça parle aussi du coup, et ça je trouve pour le coup je trouve que c’est intéressant et c’est la première fois que je vois ça à l’écran, de la relation et de l’histoire d’amour entre autre, entre du coup Barbara et Alan, qui sont les deux fondateurs de ce mouvement, et de comment la lutte contre le validisme, et le milan… et le militantisme ça a influencé leur relation. Et, vraiment je crois que c’est la première fois que je vois deux personnes handicapées en couple dans un film, du coup c’est vraiment top… à part peut-être dans Atypical mais on va pas… on va pas parler de Atypical ici.
Justine : Et là c’est deux acteurs directement concernés aussi.
Hermine : Oui, complétement, complétement. Ruth Madeley, et le… l’acteur qui joue Alan je sais plus son nom. Mais Ruth Madeley je la connaissais déjà parce que j’en avais déjà parlé dans l’épisode sur l’handiparentalité justement. Et c’est une actrice Britannique qui a une spina bifida et qui est juste géniale, Voilà. Je… j’adore ce film ! Regardez-le ! Il est dispo sur Netflix et voilà. Et il dure genre une heure sept. Du coup, pas d’excuse, vraiment, même les gens qui ont du mal à rester concentré et tout, (rire) pas d’excuse, voilà. Maintenant, je vais m’adresser plutôt aux personnes qui nous écoutent pour parler de l’avenir du podcast et du nouveau format que j’ai en tête et qui j’espère va marcher, parce que si personne participe, ben il y a plus de podcast, voilà. Je le dis direct. Du coup j’ai envie de faire un… un format un peu plus participatif où c’est les personnes qui me proposent des sujets, qui m’envoient des, des messages audio en s’enregistrant sur leur téléphone et qui vraiment parlent de ce qu’iels veulent. Enfin, je sais qu’il y a pas mal de personnes qui m’ont envoyé des messages pour leur parler de leur pathologie, de leur maladie, de leur handicap etc. et de comment ça impacte le quotidien, et je pense que c’est important d’en parler aussi. Je voulais pas faire ça dés le départ (rire bref), parce que c’est toujours ça dont on parle quand on des handicapé.es, c’est du, de la maladie et tout ça. Et j’avais pas envie que ça soit le sujet premier mais là je pense que au bout de seize, dix-sept épisodes vous aurez compris que on n’est pas juste handicapé.es et on n’est pas juste malades. Et qu’on est des personnes complexes, etc. Mais je pense que c’est quand même important d’en parler parce que voilà, on vit avec au quotidien, et je pense que c’est important que des personnes s’en rendent compte un peu mieux de ce que c’est. Mais j’ai aussi envie qu’on parle de trucs positifs et de trucs qui nous aident au quotidien et de, je sais pas, de passions, de hobbys etc. Vraiment juste de choses positives, quoi parce que on a un peu parlé de un peu de toutes les oppressions possibles, là j’ai l’impression. Et j’en ai marre de parler des oppressions tout le temps ! Le climat politique actuellement est déjà assez compliqué, et assez angoissant, et j’ai pas envie de refaire des montages de une heure, une heure et demie sur, enfin, des épisodes de une heure et demie sur le racisme etc., même si c’était hyper important d’en parler… et que voilà, même si il y a des personnes qui veulent en parler encore, carrément, mais en tout cas ce sera pas les sujets que je mettrai en avant en premier. Et aussi, s’il y a des anciens invité.es qui veulent témoigner sur d’autres sujets, et qui veulent m’envoyer des messages, vous pouvez le faire, mais ce sera pas vous que je mettrai en premier. Je mettrai d’abord les nouvelles personnes en premier, et ensuite les anciens invité.es en toute logique. Et du coup quand je dis « personnes handicapées » comme d’habitude c’est tout types de handicap confondus, donc handicap psy, handicap moteur, peu importe. Et que vous soyez diagos… diagnostiqué·es ou pas d’ailleurs, ça peut être totalement un sujet d’ailleurs. L’auto-diagnostic, le, l’errance de diagnostic, enfin ça peut vraiment être un sujet. Et du coup voilà, n’ayez pas peur, juste sentez-vous légitimes, vous êtes légitimes à témoigner, vraiment, envoyez-moi des messages, j’ai hâte de vous écouter. Du coup les personnes qui veulent témoigner et qui veulent m’envoyer des messages, vous pouvez le faire directement par mail, et que par mail, pas par Instagram, sinon je vais me… m’emmêler les pinceaux, mais du coup vous pouvez m’envoyer un mail avec votre message audio ou même juste si vous avez des questions avant d’envoyer votre message audio, vous pouvez m’envoyer un mail à hcommehandipodcast@gmail.com, si vous avez pas de dictaphone sur votre téléphone vous pouvez en trouver sur les applis, enfin il y a pleins d’applis de… d’enregistrement sur téléphone qui existent, c’est hyper facile. Et souvent le son est bien meilleur que quand on enregistre à distance, donc voilà. Vraiment j’ai hâte aussi, rien pour ça, pour la qualité du son, ça va être top.
Dorothée : J’ai une question, Hermine, s’il y a des personnes qui peuvent pas parler, est-ce que tu as besoin, moi je veux bien être voix pour, si t’as besoin de lire des, des messages écrits.
Hermine : Et ben carrément, parce-que ouais, j’y avais pensé aussi, mais je m’étais dit, au fait moi j’ai un peu du mal à lire, à voix haute surtout. Du coup carrément, si tu veux bien te proposer pour ça…
Dorothée : Moi ça me gêne pas du tout. Les gens en auront marre d’entendre ma voix hein, peut-être, mais, mais en tout cas ça me gêne pas (rire), je peux le faire.
Hermine : Ok, ben super. Du coup merci Dorothée!
Dorothée : De rien!
Hermine: Et voilà, je pense que… je pense que… qu’on a un peu fait le tour. On a un peu tout dit. En vrai là je suis un petit peu ému·e parce que c’est un peu la dernière fois que j’enregistre avec des invité·es, et après ça va être plus le même format et vraiment ça me fait bizzare. Mais je suis contente que vous soyez mes deux dernières dernières invitées.
Dorothée : Ben merci, ouais je suis touchée aussi.
Hermine : Merci à vous deux d’être revenues du coup, et on se retrouve au mois de juin pour un dernier épisode avant le nouveau format, qui sera du coup un épisode bonus avec des séquences coupées parce que souvent les épisodes ils font entre quarante-cinq minutes et une heure, mais c’est parce que j’ai coupé beaucoup de trucs au montage et que souvent les épisodes ils font beaucoup plus que ça. Et du coup voilà, ce sera une façon de… de remettre un peu ces, ces séquences en avant parce qu’en vrai c’est des trucs hyper important des fois mais qui sont juste un peu hors-sujet, que je suis obligée de couper. Mais voilà, petit épisode bonus au mois de juin.